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Des faux

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"Ce qui distingue un faux billet d’un billet vrai ne dépend que du faussaire." Peter Ustinov

Normes

COMPORTEMENT

La foi dans un titre probatoire

RÉPRESSION

Des Faux

Chapitre 1 du Titre IV

« Des atteintes à la confiance publique » du Livre IV « Des crimes et délits contre la nation, l’État et la paix publique »

Textes répressifs

(ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016)
Articles Informations
Art. 441-1 CP
« Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre supportd’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques. Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. »

En amont

Tentative

« La tentative des délits prévus aux articles 441-1, 441-2 et 441- 4 à 441-8 est punie des mêmes peines. »

Art. 441-9 CP

À rapprocher de

Répression

La fausse attestation

Art. 441-7 CP

Le faux témoignage

Art. 434-13 CP

Le faux serment

Art. 434-17 CP

La fausse monnaie

Art. 442-1 CP

Les faux chèques et autres

instruments

Art. L. 163-3 CMF

La falsification d’expertise

Art. 434-20 CP

La présentation ou publication de comptes inexactes

Art. L 241-3 ; Art. L. 242-6 Code com.

La confirmation d’informations mensongères par le CAC

Art. L. 820-7 Code com.

Atténuations

  1. La détention frauduleuse de faux document délivré par une Administration publique aux fins de constater un droit, une identité ou une qualité ou d’accorder une autorisation.
    Art 441-3 alinéa 1er CP
  2. Le fait de se faire délivrer indûment mais frauduleusement par une Administration publique un document destiné à constater un droit, une identité ou une qualité ou à accorder une autorisation.
    Art. 441-6 CP
  3. Le fait de fournir sciemment une fausse ou incomplète déclaration pour obtenir d’une personne publique une allocation, prestation, paiement ou avantage indu.
    Art. 441-6 CP

Aggravations

Les articles 311-4-1 à 311-11 énoncent les peines, par palier, allant jusqu’à la réclusion criminelle à perpétuité, selon la nature du bien volé, ou les circonstances du vol.
  1. Le faux et l’usage de faux commis dans un document délivré par une Administration publique
    • et commis par une personne dépositaire de l’Autorité publique ou chargée d’une mission de service public agissant dans l’exercice de ses fonctions
    • et commis de manière habituelle
    • et commis dans le dessein de faciliter la commission d’un crime ou de procurer l’impunité à son auteur
    Art. 441-2 CP
  2. La détention frauduleuse de plusieurs faux documents
    Art. 441-3 alinéa 2 CP
  3. Le faux et l’usage de faux commis dans une écriture publique ou authentique ou dans un enregistrement ordonné par l’autorité publique (Art. 441-4 CP) et commis par une personne dépositaire de l’Autorité publique ou chargée d’une mission de service public agissant dans l’exercice de ses fonctions ou de sa mission
    Art 441-4 CP
  4. Le fait de procurer frauduleusement à autrui un document délivré par une administration publique
    • et commis par une personne dépositaire de l’Autorité publique ou chargée d’une mission de service public agissant dans l’exercice de ses fonctions
    • et commis de manière habituelle
    • et commis dans le dessein de faciliter la commission d’un crime ou de procurer l’impunité à son auteur
    Art. 441-5 CP

Mot-clés

  • Parjure
  • Faussaire  
  • Faux-monnayeur

Histoire

Le droit romain ne connaissait qu’une seule qualification de faux : la falsum qui englobait aussi bien le faux témoignage, le faux en écriture, que la manœuvre dolosive. L’ancien droit français devait reprendre cette généralité de la qualification.

 

Cependant, le droit français moderne n’incrimine pas tous les faux au sens moral du terme : le mensonge n’est pas en lui-même punissable. Ces deux procédés, mensonge et faux, se distinguent sur un point fondamental : dans le faux, le mensonge est toujours matérialisé par le support qui a pour objet de le contenir ou de le véhiculer ; le mensonge se confond avec le support. C’est cette matérialisation du mensonge dans le faux qui le particularise et qui lui confère un régime juridique spécifique. Le législateur considère en effet que le faux risque d’affaiblir la force probatoire des actes et de porter atteinte à la confiance que l’on doit porter à certains documents.

 

De plus, le droit positif français a été amené à établir une différence entre la contrefaçon d’une manière générale et les différents faux particuliers. C’est ainsi que, sous la rubrique des faux, le Code pénal traite à la suite : du faux en écritures privée ou publique ; de la fausse monnaie ; de la falsification des titres ou autres valeurs fiduciaires émises par l’autorité publique etc.

Puisque selon l’adage « Foi est due au titre », ce qu’exprime le support matériellement modifié (notion jurisprudentielle de « faux matériel») ou intellectuellement dénaturé (ou « faux intellectuel ») doit pouvoir entraîner la conviction d’un droit et ne pas en être resté au stade de la déclaration unilatérale encore soumise à vérification et discussion.

 

Cela en fait déjà une qualification centrale bien qu’extérieure à l’univers marchand, définissant ainsi a contrario toutes les autres atteintes patrimoniales où la dépossession est obtenue en biaisant le consentement alors que le vol se définit par le fait de ne même pas avoir envisagé de le solliciter. Les infractions d’affaires n’ont pas cette simplicité du vol et c’est ce qui leur permet de prétendre à une marge de discussion pour s’essayer à l’impunité.

Jurisprudence

« Qu’en effet, une déclaration unilatérale, transmise à un créancier, même en exécution d’une prescription légale pour établir l’assiette d’une dette, ne contient aucune convention, disposition, obligation ou décharge et ne constitue pas un titre ; Qu’il suit de là que les indications mensongères, insérées dans cette pièce, ne présentent pas les éléments constitutifs du délit de faux en écriture privée ».

Crim. 23 novembre 1972, n° 72-91.163

À partir de quoi un mensonge fait-il titre ?
« S’il est vrai que des documents ou écrits mensongers tels que des notes et factures, qui sont par leur nature soumis à discussion et à vérification, ne constituent pas en eux-mêmes des titres susceptibles d’entrer dans les prévisions... du Code pénal, il en est autrement dès lors que, comme en l’espèce, les fausses énonciations résultant de ces opérations fictives ont été reportées sur les livres comptables de la société, pour leur donner l’apparence d’actes de commerce réels et y traduire l’existence d’une activité commerciale, en fait imaginaire ».

Crim. 10 novembre 1999, n° 98-807.60

« Le bilan et le compte de résultat, documents obligatoires établis par l’expert-comptable, ont par eux-mêmes un caractère probatoire, indépendamment du contrôle exercé postérieurement par le commissaire aux comptes ».

Crim. 17 décembre 2003, n°03-80.955

« L’établissement de factures sous-évaluées ou fictives, adressées à des filiales, constitue les délits de faux et usage... En sa qualité de responsable du service export de la société V. Viandes et de gérant des filiales africaines bénéficiaires du système, [diminution des droits de douane] celui-ci a eu conscience de l’altération de la vérité et du préjudice subi par son employeur... Constitue un faux le fait d’établir, en vue de justifier des mouvements de fonds en comptabilité, des pièces justificatives inexactes concernant le prix de marchandises facturées et de prestations inexistantes ».

Crim. 20 juin 2007, n°06-88.225

« Dès lors que les décomptes de remboursement informatisés, établis à partir des données erronées introduites dans le système de traitement automatisé de... constituent des documents faisant titre entrant dans les prévisions de l’article 441-1 du code pénal ».

Crim. 24 janvier 2001, n°00-83.915

« Le caractère préjudiciable actuel ou éventuel du faux peut résulter de la nature même de la pièce falsifiée. Qu’il en est ainsi des procès-verbaux d’une assemblée générale extraordinaire d’une société anonyme dont la falsification met en cause la validité des décisions apparemment prises ».

Crim. 21 mars 1972, n°70-92.992

« Il convient de relever que si les assemblées générales ordinaires ne constituent pas des instances décisives pour la vie de la société, il n’en reste pas moins qu’elles participent à la vie sociale et qu’en tant que telles, celles-ci ne peuvent être réduites à de simples formalités formelles n’ayant aucune incidence tant sur la société que sur le sort des actionnaires ; que de même la circonstance même pour François X... d’avoir fait signer à Daniel D... un document où ce dernier lui cédait ses parts indique bien que la place prise par cet associé ne pouvait être réduite à un simple rôle formel ; que François X... a signé les procès-verbaux des assemblées générales de la société Avenir déménagement sur lesquels était portée la mention de la convocation des associés, parmi lesquels Daniel D... et de l’absence de celui-ci ; que sur ce point le prévenu a prétendu qu’il s’agissait d’une erreur de la société Expert 21 ; que d’ailleurs les assemblées générales se seraient tenues dans les locaux de celle-ci laquelle était donc responsable de l’établissement de ces faux ; que cependant, l’expert-comptable a fait savoir qu’il ne s’agissait nullement d’une erreur de sa part, n’ayant jamais été informé de la cession de parts et les assemblées générales ne s’étant jamais tenues dans ses locaux ; que les explications données par le prévenu qui se trouvent contredites par l’expert-comptable sont exclusives de toute absence d’élément intentionnel et ne tendent au contraire qu’à permettre au prévenu d’échapper à sa responsabilité »... « La cour d’appel, abstraction faite du motif erroné mais non déterminant dénoncé à la première branche du moyen, a justifié sa décision, dès lors que le préjudice causé par la falsification d’un écrit peut résulter de la nature même de la pièce falsifiée, et que tel est le cas de l’altération de procès-verbaux d’assemblée générale d’une société, qui est de nature à permettre de contester la régularité et les pouvoirs de cet organe ».

Crim. 20 mars 2007, n°05-85.253

« Pour déclarer M. X... coupable de faux et usage, l’arrêt énonce que le prévenu a fait établir et a remis à la société Technik clim un ordre de virement libellé au nom d’une ancienne société dont il avait été le gérant de fait ; que les juges ajoutent que la créance de la société Technik n’a pu être honorée ». « Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé ces délits en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, a justifié sa décision ».

Crim 16 octobre 2013, n° 12-87.096

« Durant la période du 1er avril 1999 au 31 août 2000, pendant laquelle elle était officiellement salariée de l’association BSV, Angélique A... n’a pas effectué la moindre prestation pour cette association et selon ses dires et ceux du président passait seulement en fin de mois au siège de l’association pour récupérer sa fiche de paye et le chèque des salariés signés de celui-ci ; que l’embauche d’Angélique A... est une embauche fictive par l’association BSV puisqu’elle conservait son emploi pour le compte d’Office du Tourisme de Bandol et n’effectuait aucun travail pour BSV puisqu’elle conservait son emploi pour le compte de l’Office du Tourisme de Bandol et n’effectuait aucun travail pour BSV ; que les différents contrats, certificats et bulletins de salaires délivrés par BSV à Angélique A... sont des faux intellectuels ».

Crim. 11 février 2009, n° 08-84.412

Filmographie

Faux et Usage de faux (1990)

Laurent Heynemann (inspiré de l’affaire Emile Ajar)