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Surévaluation des apports en nature, distribution de dividendes fictifs

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"L’expérience nous montre partout la nécessité du numéraire réel pour soutenir le numéraire fictif." Mirabeau

Normes

COMPORTEMENT

Préservation du capital social

RÉPRESSION

Surévaluation des apports en nature

 

Distribution de dividendes fictifs

Titre IV du Livre II du Code com.

Textes répressifs

(ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016)
Articles Informations
Art. L. 241-3 Code com. SARL

« Est puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 375 000 euros :
1° Le fait, pour toute personne, de faire attribuer frauduleusement à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle ;
2° Le fait, pour les gérants, d’opérer entre les associés la répartition de dividendes fictifs, en l’absence d’inventaire ou au moyen d’inventaires frauduleux ; (...) »

Art. L. 242-6 Code com. SA

« Est puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 375 000 euros le fait pour

1° Le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d’une société anonyme d’opérer entre les actionnaires la répartition de dividendes fictifs, en l’absence d’inventaire, ou au moyen d’inventaires frauduleux ;

2° Le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d’une société anonyme de publier ou présenter aux actionnaires, même en l’absence de toute distribution de dividendes, des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l’exercice, de la situation financière et du patrimoine, à l’expiration de cette période, en vue de dissimuler la véritable situation de la société ; »

Art. L. 243-1 alinéa 1er Code com. Société en commandite par actions

« Les articles L. 242-1 à L. 242-29 s’appliquent aux sociétés en commandite par actions. Les peines prévues pour les présidents, les administrateurs ou les directeurs généraux des sociétés anonymes sont applicables, en ce qui concerne leurs attributions, aux gérants des sociétés en commandite par actions. »

En amont

Bénéfice distribuable

Art. L. 232-11 Code com.

Réduction du capital emportant rupture de l’égalité des actionnaires

Art. L. 242-23 Code com.

Promesse de vote

Art. L. 242-9, 3° Code com.

À rapprocher de

L’escroquerie

Art. 313-1 CP

Émission d’action illicite

Art. 242-1 Code com.

Présentation ou publication de comptes infidèles

Art. L. 241-3 Code com.

Mot-clés

  • Valorisation
  • Capitaux propres
  • Bénéfices distribués

Histoire

Ces deux infractions qui figurent au début des deux textes identiques des délits réprimés en matière de société, SARL et SA, sont souvent retenues comme qualifications accessoires de celles qui suivent, comptes infidèles et abus de biens sociaux ou pour la surévaluation des apports inclus dans une qualification d’escroquerie. En fait à l’usage ces autres qualifications étant plus « parlantes » elles les marquent. Ainsi pour que les dividendes soient fictifs il faut en amont un bénéfice qui n’existe pas et donc des comptes faux ou comme dit maintenant infidèles. L’appréciation des apports étant soumise à un processus de contrôle par un commissaire aux comptes spécialement désigné c’est de la responsabilité de celui-ci, y compris pénale, que sera obtenue la protection de ceux qui viennent à participer au capital que ce soit initialement ou lors d’une augmentation ultérieure.

Jurisprudence

« ... dans le cadre du rapprochement entre la société L. ... et FDG, la société UGMA, filiale de FDG, a fait apport des éléments incorporels de son fonds de commerce à la société L. ; que, préalablement, la société FDG a confié à la société IEA une mission d’audit de la société L. ; que, par une ordonnance du Président du tribunal de commerce, la société a été désignée en qualité de commissaire aux apports chargé d’apprécier la valeur de l’apport en nature fait par la société UGMA à la société L. ; que, dans son rapport du 22 décembre 2004, la société IEA, ..., a entériné la valeur de 800 000 € estimés par les parties au traité d’apport du 14 décembre 2004, ... que suite aux difficultés rencontrées.. M. L. ... a demandé au cabinet d’expertise comptable PWC d’établir un constat sur la valeur du fonds apporté par la société UGMA et l’éventuel préjudice subi par la société L. ; que ce cabinet a conclu que le fonds avait été sous-évalué, que la société L. avait subi un préjudice ; que M. L. a porté plainte... ; que le juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu dont M. L. a fait appel.

... Le rapport établi par... IEA, répondait parfaitement aux normes légales et professionnelles concernant l’évaluation des éléments incorporels du fonds de commerce de la société UGMA , filiale de la société FDG, que cette dernière devait apporter à la société L. ; que le simple fait que ce rapport soit contredit par celui réalisé par le cabinet d’expertise comptable PWC à la demande de M.L., ... n’est pas suffisant à établir les faits de majoration frauduleuse ; que M. L. reconnaît, lui-même, s’être déplacé sur le site de production de la société UGMA et avoir pu constater le potentiel qu’il pouvait retirer d’un tel apport ; qu’il ressort des décisions de justice rendues au civil et au commercial que l’échec de l’apport envisagé apparaît avoir pour origine un manquement de la société C. dans son contrat d’approvisionnement en matière première, ... indépendamment, de l’existence d’éventuelles déloyautés ; que la mission ... IEA, réalisée en septembre 2004 a plutôt consisté à apprécier la santé de la société L. dont la société DG allait recevoir des capitaux en échange de l’apport des éléments incorporels du fonds de commerce de la société UGMA ; que dès lors, ces faits n’étant pas établis,... un non-lieu... ;
Mais vu les articles L.225-147 et L. 822 11 du code de commerce ; Attendu qu’il résulte de la combinaison de ces textes que le commissaire aux apports, ne prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt auprès de la personne ou de l’entité auprès de laquelle il effectue sa mission, auprès de la personne qui la contrôle ou est contrôlée par elle ;
Casse et annule l’arrêt... mais en ses seules dispositions ayant confirmé l’ordonnance de non-lieu du juge d’instruction du chef d’exercice des fonctions de commissaire aux apports nonobstant les interdictions ou incompatibilités illégales, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; ».

Crim. 6 avril 2016, n°15-81.273

« S’agissant de la distribution de dividendes fictifs : qu’au vu des résultats de l’exercice 2008, M.X... s’est octroyé en 2009 pour un montant de 130 000 € de dividendes alors qu’une telle opération n’aurait pas été possible sans la comptabilisation des fausses factures adressées à la société LGMX en 2008, dès lors, qu’en l’absence d’une telle comptabilisation, le bilan de cet exercice aurait présenté une perte de 372 000 €, au lieu d’un bénéfice de 290 000 €, faisant ainsi obstacle à toute distribution de dividendes ; qu’en conséquence que l’infraction est caractérisée.»

Crim. 8 juillet 2015, n° 14-81.499