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Tromperie et pratiques commerciales interdites

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"Le commerce est l’école de la tromperie." Luc De Clapiers Marquis De Vauvenargues, Réflexions et maximes,1746.

Normes

COMPORTEMENT

Le consentement du consommateur

RÉPRESSION

Pratiques commerciales interdites

Chapitre 1er du Titre II du Livre 1er Code conso.

Tromperies

Chapitre unique du Titre IV Code Conso.

Textes répressifs

(ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016)
Articles Informations
Art. L. 121-1 Code conso.
« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service. (…) »
Art. L. 121-2 Code conso.

« Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes :
1° Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent ;
2° Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants : (…)
3° Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable. »

Art. L. 121-3 Code conso.

« Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte. (…) »

Art. L. 121-4 Code conso.

« Sont réputées trompeuses, au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet : (…) »

Art. L. 121-6 Code conso.

« Une pratique commerciale est agressive lorsque du fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l’usage d’une contrainte physique ou morale, et compte tenu des circonstances qui l’entourent :

1° Elle altère ou est de nature à altérer de manière significative la liberté de choix d’un consommateur ;

2° Elle vicie ou est de nature à vicier le consentement d’un consommateur ;

3° Elle entrave l’exercice des droits contractuels d’un consommateur.

Afin de déterminer si une pratique commerciale recourt au harcèlement, à la contrainte, y compris la force physique, ou à une influence injustifiée, les éléments suivants sont pris en considération :

1° Le moment et l’endroit où la pratique est mise en œuvre, sa nature et sa persistance ;

2° Le recours à la menace physique ou verbale ;

3° L’exploitation, en connaissance de cause, par le professionnel, de tout malheur ou circonstance particulière d’une gravité propre à altérer le jugement du consommateur, dans le but d’influencer la décision du consommateur à l’égard du produit ;

4° Tout obstacle non contractuel important ou disproportionné imposé par le professionnel lorsque le consommateur souhaite faire valoir ses droits contractuels, et notamment celui de mettre fin au contrat ou de changer de produit ou de fournisseur ;

5° Toute menace d’action alors que cette action n’est pas légalement possible. »

Art. L. 121-7 Code conso.

« Sont réputées agressives au sens de l’article L. 121-6 les pratiques commerciales qui ont pour objet : (…) »

Art. L. 441-1 Code conso.

« Il est interdit pour toute personne, partie ou non au contrat, de tromper ou tenter de
tromper le contractant, par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers :
1° Soit sur la nature, l’espèce, l’origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de toutes marchandises ;
2° Soit sur la quantité des choses livrées ou sur leur identité par la livraison d’une marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l’objet du contrat ;
3° Soit sur l’aptitude à l’emploi, les risques inhérents à l’utilisation du produit, les contrôles effectués, les modes d’emploi ou les précautions à prendre.
Les dispositions du présent article sont également applicables aux prestations de services. »

Art. L 454-1 Code conso

« La violation de l’interdiction prévue à l’article L. 441-1 est punie d’une peine d’emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros. »

En amont

La Vente

Art. 1582 Code Civ.

Tentative de tromperie

Art. L. 441-1 Code conso.

À rapprocher de

La Fraude fiscale, informatique etc.

 

Le Faux

Art.441-1 et S. CP

L’Escroquerie

Art.313-1 CP

Le dol

Art.1137 Code Civ.

La concurrence déloyale

Mot-clés

  • Tricherie
  • Supercherie
  • Artifice
  • Arnaque
  • Frelatage
  • Frustrer

Histoire

Vendre, premier acte de commerce, a immédiatement entraîné les premières règles d’appréciation des qualités, quantités, depuis les codes de l’antiquité puis dans les règlements des foires médiévales qui se perpétuent et se développent avec la protection contemporaine du consommateur comme des produits.

Jurisprudence

« ... en présentant, avant la conclusion des contrats, un taux d’atténuation théorique prévisible du signal qu’elle savait systématiquement sous-évalué et en bridant l’accès au service de certains utilisateurs sans avoir mentionné que la société se réservait cette possibilité ... qu’est caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu’intentionnel, non seulement le délit de tromperie sur les qualités substantielles d’une prestation de service, mais également celui qualifié de publicité mensongère par l’article L 121-1 du Code de la consommation dans sa rédaction en vigueur au moment des faits, puis qualifié de pratique commerciale trompeuse dans sa rédaction issue de la loi du 3 janvier 2008 ; »

[L’article L 121-1 est devenu L 121-2 en 2016]

Crim. 27 janvier 2015, n° 14-80.220

« Attendu que l’arrêt retient, en ce qui concerne la publicité de nature à induire en erreur, que les prévenus ont annoncé sur l’étiquetage que les produits étaient “100% naturel” et “certifiés par le laboratoire pour leur pureté et leur efficacité”, alors qu’en raison de leur mode d’élaboration, du traitement des ingrédients et de l’addition en quantité importante de vitamines et minéraux, ils ne pouvaient prétendre au qualificatif de naturel, que les demandeurs n’ont pas été en mesure de produire des certificats d’analyse de laboratoire correspondant aux produits vendus et qu’au regard de la pureté bactériologique, les hydrolysats de protéine, entrant dans la composition de certains produits, n’avaient pas fait l’objet des vérifications analytiques prescrites par l’arrêté du 21 décembre 1988.

Attendu qu’en l’état de ces seuls motifs procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause et des preuves contradictoirement débattues, la cour d’appel, qui n’a pas méconnu le principe de légalité des délits et des peines, a justifié sa décision »

Crim. 1er février 2000, n° 99-80.825

« … loin d’être ponctuelle et non délibérée, l’indisponibilité des articles, objet de la campagne publicitaire de la SNC LIDL relève d’une politique commerciale voulue et organisée, au préjudice des consommateurs, de telle sorte que les faits de la prévention caractérisent le délit de pratique commerciale trompeuse »

Crim. 24 mars 2009, n°08-86.530

« Une enquête a établi la pratique de la macération directe de copeaux de bois dans l’alcool, l’économie réalisée par cette pratique par rapport à une infusion brève dans de l’eau chaude distillée s’établissant à 198 064 € pour l’année précédant le contrôle ; ... pour dire établis les délits de tromperie et de falsification, l’arrêt retient notamment que le règlement 110/2008 du 15 janvier 2008, qui définit les eaux de vie et brandies, n’interdit pas les méthodes traditionnelles ; ... reconnaît la pratique traditionnelle de l’aromatisation par addition de la fusion de copeaux de chêne se faisant dans l’eau distillée ; qu’ils en déduisent que la procédure n’établit l’existence d’aucune autre pratique et qu’en conséquence l’infusion de copeaux dans un produit autre que l’eau distillée constitue une manipulation illicite de la boisson. »

Crim 18 novembre 2014, n° 13-86.660

« ... plusieurs emballages de viande fraîche avaient été reconditionnés avec des dates de consommation prorogée et que d’autres mentionnaient une race d’origine non conforme à la réalité ; que la société K., exploitant le magasin et dont le président-directeur général est M. Georges Y., a été poursuivie pour tromperie ; que le tribunal l’a déclaré coupable des faits reprochés ; ... , pour confirmer le jugement et retenir la responsabilité de la personne morale, l’arrêt, par motifs propres et adoptés, après avoir relevé que la tromperie, reposait non sur une erreur ponctuelle, mais sur une attitude systématisée, poursuivie dans un but lucratif pour la personne morale ne prenant aucun compte des contraintes légales et attestée par la multiplication d’incidents graves relevés par des contrôles sanitaires réguliers, énonce que M.Y., en sa qualité de dirigeant de l’entreprise, avait la compétence pour mettre en œuvre les mesures de contrôle et de gestion des denrées rigoureuses, s’est abstenu d’agir en ce sens et c’est délibérément maintenu de ses obligations ; attendu qu’en statuant ainsi, et dès lors que l’infraction de tromperie peut être commise par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l’intermédiaire d’un tiers, la cour d’appel a justifié sa décision... »

Crim., 22 mars 2016, n° 15-82.677 - Crim. 27 janvier 2015, n° 14-80.220

L’Article 121-1 CP circonscrit le champ de l’imputabilité : « Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait », or une personne morale ne le peut faire que par ses représentants et logiquement l’Article 121-2 CP ne prévoit leur responsabilité que « des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants », ce qui peut se déduire de la politique générale de tromperie ou de tout autre activité volontairement illicite que personne d’autre n’a pu décider.

« Attendu que, pour infirmer le jugement, l’arrêt énonce que le consommateur, auditeur du message radiophonique litigieux, intéressé par une remise de 10 euros, se rendant dans un magasin Marionnaud et, prenant ainsi une décision commerciale, n’était pas complètement informé des conditions de vente des produits et se trouvait donc victime d’une pratique commerciale trompeuse ; Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans avoir procédé à l’appréciation des limites propres au moyen de communication utilisé et aux circonstances qui l’entourent, et des mesures prises par le professionnel pour mettre ces informations à la disposition du consommateur par d’autres moyens, ainsi qu’il est prévu par l’article L. 121-1-II du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi du 17 mars 2014, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ; »

Crim. 1er septembre 2015, n°14-85.791

Pas d’infraction s’agissant d’une publicité radiophonique qui annonçait, certes sans énoncer de conditions, une remise de 10 % à ceux qui se présenteraient dans l’une des boutiques d’une enseigne de parfumerie, mais qui invitait à consulter le site Internet sur lequel étaient précisées les conditions de détention d’une carte de fidélité et de montant minimum d’achat subordonnant cette remise.